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ANORI - Poèmes au vent de l'Arctique

Poèmes au vent de l’Arctique

68°44’N – 52°21’W, Akunnaaq, Groenland

2019

« ANORI », « le vent » en Groenlandais, est une création de Land Art réalisée en 2019 à Akunnaaq, Groenland, parrainée par l’association « Les Amis du Manguier ». Sur une ancienne toile à voile, l’artiste plasticienne Oïjha invite les enfants du village et le doyen, Peter Larsen, à exprimer par des dessins, des textes et des poèmes leurs émotions face à la Nature omniprésente qui les entoure, puis à suspendre ces œuvres dans des lieux porteurs de sens. Elle se joint à cette initiative avec la calligraphie de ses « Poèmes arctiques » à l’encre de seiche. Tels des drapeaux de prières, les toiles sont exposées aux quatre vents, porteurs de messages intimes dans l’infini paysage de l’Arctique.

L’idée d’ANORI est née d’un détail esthétique récurrent dans les villages groenlandais avec la présence d’innombrables fils à linge suspendus entre les maisons sur lesquels sèchent les habits très colorés des habitants. Même en plein hiver arctique, alors que la température avoisine fréquemment les moins trente degrés, on peut observer ces tissus gelés qui flottent au vent. Alors, pourquoi ne pas transposer ce spectacle poétique quotidien en instrument d’expression artistique ?

L’association « Les Amis du Manguier » a fourni un matériau précieux et très résistant avec une ancienne toile à voile de plusieurs mètres carrés. Qu’une voile usagée puisse continuer à battre dans le vent avec une autre forme de poésie et d’idéal portait une symbolique importante.

De la dimension inter-culturelle Franco-Groenlandaise :

Cette création de Land Art s’inscrit dans la continuité des résidences « Artistes en Arctique » organisées par « Les Amis du Manguier » depuis 2016 à Akunnaaq, dans un souhait de revitalisation du village par l’art et la culture. Présente sur place plusieurs mois pendant 2018-2019, Oïjha a noué des liens avec les habitants du village, dans échange inter-culturel quotidien. La présence du navire Le Manguier dans la banquise de Qammavinguaq a encadré ce projet et lui a donné un écho inter-culturel plus large au sein de la Commune de Qeqertalik.

Une mise en lumière des valeurs trans-générationnelles :

ANORI a commencé avec les enfants d’Akunnaaq pendant des ateliers artistiques animés sous la direction des instituteurs Ane Jeremiassen et Jens Piitaq, sur sept toiles colorées (acrylique et encre de seiche). Par la suite, le projet s’est développé avec le doyen Peter Larsen et la calligraphie de quatre de ses poèmes. Peter Larsen est né en 1941 à Akunnaaq. Sa vie est remplie d’histoires de chasse aux phoques, aux narvals et aux rennes. A l’époque, le mode de vie était entièrement dépendant de la nature et de l’habileté des chasseurs à bord de leur kayak. Lorsqu’il nous reçoit, Peter Larsen en parle avec un grand enthousiasme. Ses poèmes sont des chants qui célèbrent ce mode de vie et l’attachement des Groenlandais à leur Terre, « Kalaallit Nunaat ». Pour « ANORI », Peter Larsen a travaillé avec Oïjha pour l’illustration des plus grands formats. Une toile a également été réalisée par le capitaine Philippe Hercher en remerciement à ces deux artistes et à leur travail alliant le dialogue interculturel et intergénérationnel, dans un esprit de valorisation du village d’Akunnaaq par le Land Art.

Land Art, le choix de lieux porteurs de sens : la composition réalisée par les enfants a été installée le 12 février 2019. Oïjha a installé ses sept toiles le 1er mars 2019 en un lieu éphémère, sur la banquise de Qammavinguag, « le lieu où l’on voit les animaux ». Régisseur du projet, le Capitaine Philippe Hercher a construit l’ensemble de la structure en bois sur la banquise. Le 31 mars, les trois toiles réalisées par le doyen Peter Larsen ont été placées avec deux de celles d’Oïjha en plein coeur du village, dans un vaste espace situé entre le littoral et l’école.

Des dessins et poèmes inspirés par la Nature : Les ateliers animés près des enfants ont permis de mettre en lumière le quotidien arctique avec les dessins d’éléments du paysage et des Inuits, « les hommes vrais ». Le doyen Peter Larsen a calligraphié quatre de ses poèmes sur trois toiles, inspirés par la Terre du Groenland (Kalaallit Nunaat), l’Hiver (Ukioq) et un Jour de Fête. Oïjha a choisi neuf de ses « Poèmes arctiques » pour la création de toiles grands format suspendues sur la banquise. Ces poèmes, réalisés en plein hiver lors de la résidence « Artistes en Arctique » (recueil « Auroras Corpus ») et pendant sa retraite d’été de deux mois en solitaire à bord du Manguier (recueil « Solstices »), sont rassemblés côte à côte. Poèmes de l’immense nuit polaire et de l’immense lumière du soleil de minuit, ils mélangent le clair et l’obscur dans le vent de l’Arctique. Chacun conçus sous le signe d’un mot Groenlandais, ils sont calligraphiés à l’encre de seiche.

De la poésie.

Du désert.

De l’espace.

De l’impermanence.

Du cœur à l’espace par l’intermédiaire de la voile.

Du lien d’attachement entre Oïjha et Akunnaaq.

Du contraste entre la nature impalpable de la poésie et la rudesse du vent de l’Arctique.

De la dimension qui s’ouvre entre extrême force et pure douceur.

De la symbolique des drapeaux de prières.

De l’encre de seiche comme moyen d’écriture.

Du fil à linge comme support artistique minimaliste.

Du détournement de l’objet usuel comme support d’œuvre poétique.

Du lien entre les cultures et les générations.

De la création mue par la nature.

De l’émotion née du silence. De l’émotion née du bruit de la voile dans le vent.

De la disparition de la structure en tant qu’œuvre pour que ne subsiste que le message, l’intention poétique.